DECRYPTAGE DU PROGRAMME D’ACTIONSGOUVERNEMENTALES(2024-2028)

M. ALOUMA MWAKOBILA Lucas
Chercheur et écrivain en politiques publiques de développement (UNILU)
Spécialiste en économie rurale et de développement (UNIKIN)
Spécialiste en matières douanières et technologie des marchandises du commerce international (Ecole
de douanes de Bruxelles)
loucasalouma@yahoo.fr +243 997 85 3773
Regroupement politique AAAP, allié à l’UDPS, dirigé par le Haut Représentant de l’Autorité Morale
M. KANKU SHIKU Tony

  1. Du point de vue Contexte
  • La narration sur la guerre doit être explicite et sans ambiguïté surtout de la part du gouvernement. Si la guerre a mis en mal les actions gouvernementales du quinquennat passé et n’a pas permis au pays d’atteindre ses objectifs, il s’agit
    là d’une contrainte de taille qui pourrait récidiver étant donné la stagnation des hostilités à ce jour. La situation devrait être peinte pour ce qu’elle est réellement, malheureusement l’agression rwandaise est dénoncée sans citer nommément ses complices régionales et internationales. Cette guerre, intervenue pendant une période de conjoncture internationale difficile caractérisée par la hausse
    des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, nécessite de la part du
    gouvernement de politiques publiques centrées sur plus d’indépendance et plus d’affirmations à l’égard des nouvelles opportunités de coopérations qui s’offrent sur la scène internationale.
  • Certains programmes du gouvernement passé ont présenté des faiblesses qu’il
    faille reconnaitre afin d’être à mesure de les réajuster, il s’agit par exemple de
    la gratuité de l’enseignement de base et du PDL-145T.
  • A travers le contrat avec SICOMINES, le gouvernement compte réceptionner 12.000 km des routes d’ici 2028, entièrement construites. Il convient de noter cet engagement et y veiller sans sinécure.
  1. Du point de vue du Cadre théorique du programme gouvernemental
    2.1. Questionnements
  • A la page 7, en parlant du principe directeur de la promotion du dialogue entre
    l’Etat et les communautés ethno-administratives comme un instrument clé pour
    la consolidation de la paix et de la cohésion nationale ; ici nous aimerions juste
    savoir, compte tenu de l’importance des éléments de langage, ce que signifie « communautés ethno-administratives ».
  • A la page 9, parlant des engagements majeurs du gouvernement, l’accès aux services de base a été retenu pour permettre d’éliminer progressivement les disparités géographiques entre milieux urbain et rural. Je me permets de corriger le mot en gras par sociales.
    2.2. Au sujet des chaines de valeurs agricoles et sécurité alimentaire
    Ce secteur étant le plus important, je me propose de restituer ici mes propositions de politique, mutatis mutandis. Ma motivation est guidée par la nécessité de fournir des
    bases conceptuelles utiles à de meilleures politiques.
    2.2.1. Situation du secteur agricole congolais
  • Conditions agroécologiques et systèmes de production : essentiellement une production itinérante sur brûlis avec des rendements très limités et un gros
    impact négatif sur l’environnement et la déforestation. Les cultures pérennes totalement abandonnées même si ces derniers temps, on observe quand même une relance de la production cacaoyère et de l’huile de palme mais c’est toujours par des petits exploitants ;
  • Difficultés d’approvisionnement en semences agricoles de qualité et autres intrants agricoles ;
  • Problèmes fonciers rendant difficile l’agrandissement des exploitations
    agricoles ;
  • Difficultés d’accès aux marchés, enclavement et insuffisance des
    infrastructures commerciales comme par exemple les unités de stockage ;
  • Faible niveau de la transformation agricole : les produits sont vendus sans augmentation de la valeur ajoutée ;
  • Economie de subsistance aux valeurs singulières assurant la solidarité viagère de proximité à côté d’une économie à la marchandisation alimentaire s’exerçant au détriment de l’autoconsommation ;
  • Système de consommation alimentaire avec des modèles
    d’approvisionnements classiques où prédomine l’autosubsistance, avec
    également des tabous dans les habitudes alimentaires ;
  • etc.
    2.2.2. Orientations stratégiques
    2.2.2.1. Principes d’intervention
  • Appui aux filières agricoles porteuses.
  • Filières vivrières en promouvant des itinéraires techniques rentables, nutritifs et
    protectrices de l’environnement ;
  • Identifier et appuyer certaines cultures pérennes comme le cacao, le café, le palmier à huile ou autres ;
  • Cultures maraichères au niveau des hinterlands de villes ou autres grands
    centres de consommation, tout en luttant contre la contamination en métaux lourds due à la pollution et à l’emploi des engrais.
  • Appui aux exploitations familiales ainsi que l’appui à la mise en place de
    grandes exploitations du type BUKANGA LONZO et SERVICE NATIONAL.
  • Renforcement de l’encadrement agricole et rural.
    2.2.2.2. Axes d’intervention prioritaires
    1) Amélioration de la gouvernance du secteur agricole, La productivité agricole et l’accroissement des revenus des ménages ne peuvent évoluer sans l’amélioration de la gouvernance à travers le renforcement des capacités des acteurs de développement. Pour cela,
    promouvoir la concertation locale avec la mise en place des cadres consultatifs
    au niveau des ETD. Pour harmoniser les interventions sur terrain entre l’Etat et ses partenaires, un cadre de concertation a été mis en place dans le cadre de la réforme agricole de 2012, le GT15, et au niveau des provinces, les conseils consultatifs provinciaux anciennement appelés « CARG ». C’est dans le même cadre que nous suggérons la mise en place des comités territoriaux de proximité pour le pilotage du PDL-145T en remplacement des agences d’exécution.

    2) Développement des systèmes de production
  • Relance de l’appui-conseil par les structures de l’Etat ;
  • Production et appui à l’approvisionnement en semences de qualité (SENASEM
    et les agri multiplicateurs) ;
  • Promotion d’une agriculture durable, respectueuse de l’environnement en
    favorisant la sédentarisation des exploitants agricoles ;
  • Appui à la gestion intégrée des sols et des cultures ;
  • Appui à l’innovation à travers la recherche agricole ;
  • Structuration agricole et financement des Organisations Paysannes Agricoles ;
  • etc.
    3) Appui à la transformation et la commercialisation des produits agricoles
  • Mise en place de petites unités de transformation au niveau des OPA et de
    grandes unités de transformation par l’implantation des centres de
    transformation agricole au niveau de quelques chef lieux des secteurs ;
  • Construction des unités de stockage relais au niveau des bassins de production
    et de grandes unités de stockage aux points d’enlèvement des produits vers les
    centres de consommation ;
  • Désenclavement des bassins de production par la réhabilitation des voies de
    desserte agricole et par le dégagement et le drainage des rivières, fleuve ou
    autres petits cours d’eau ;
  • Appui aux structures paysannes avec des moyens de transport adéquats :
    vélos, tricycles, camions, embarcations en bois fortifiées, bateaux, …
    4) Appui au système de consommation alimentaire
  • Introduction en certains milieux de la culture de soja pour lutter contre certaines
    carences aigues en protéine ;
  • Contrôle des naissances (naissance désirable et éducation sexuelle) ;
  • Appui à l’élaboration des produits alimentaires spécifiques (aliments pour bébé
    par exemple) ;
  • Action éducative en nutrition visant le régime alimentaire équilibré et la
    déculturation progressive des mœurs alimentaires tabouisées ;
  • Vulgarisation à l’hygiène alimentaire et environnementale ;
  • Etc.
    5) Acquisition pour les opérations d’urgence de deux avions cargo pour le
    Ministère de l’agriculture et la sécurité alimentaire
  • Assurer avec célérité le transport des semences, alevins et géniteurs
    améliorés ;
  • Transporter certains aliments stratégiques vers les milieux en carence
    saisonnière ou sporadique, et vers les grandes villes comme Kinshasa,
    Lubumbashi et Kisangani, en proie aux prix surfaits et à la détresse alimentaire ;
  • Assurer les échanges alimentaires entre différents milieux afin de combler le
    déficit alimentaire dû à l’absence de certains produits résilients pour une
    alimentation saine ;
  • Etc.

    6) Le PDL-145T
    Se succédant aux différents programmes, notamment le Plan National Stratégique du
    Développement (PNSD) 2019-2023, le Programme d’Actions du Gouvernement (PAG)
    2021-2023 et le Programme Présidentiel Accéléré de Lutte Contre la Pauvreté et les
    Inégalités (PPALCPI), le PDL-145T a le mérite d’avoir satisfait amplement l’objet de
    nos recherches antérieures ayant plaidé pour des approches zonales ou territoriales
    en vue de stabiliser les populations rurales d’où dépendra la stabilité du pays. Parmi
    les faiblesses du PDL-145T, il sied de reconnaitre que ce programme est centré autour
    de la composante « infrastructures socio-économiques de base » qui absorbe à elle
    seule 70% des ressources, au détriment de la composante « économie rurale et
    chaines de valeurs » dont les ressources sont largement insuffisantes (17,6%) par
    rapport aux objectifs recherchés par le programme, à savoir la sécurité alimentaire et
    la croissance agricole. La première phase de lancement du PDL-145T a concerné le
    volet des infrastructures, il vient à présent le tour de la deuxième phase qui va intégrer
    le volet agricole pour lequel une optimisation sur les plans techniques et opérationnels
    par l’actuel gouvernement s’impose avec acuité aujourd’hui plus qu’hier car il en va de
    la réussite socio-économique du gouvernement. Quelques suggestions :
  • Refaire les études de faisabilité centrées sur les chaines de valeurs agricoles
    optimales et la sécurité alimentaire pour une prise en charge de tout le secteur
    agricole ;
  • Redéfinir le chronogramme du PDL-145T (5 ans au lieu de 3 ans) et les coûts
    du PDL-145T (1.500.000 dollars américains pour les infrastructures et leurs
    amortissements, 3 milliards dollars américains pour la croissance agricole et la
    sécurité alimentaire et 500 millions dollars américains pour les frais généraux) ;
  • Installer les bureaux provinciaux de coordination dans chaque province qui
    serviront pour le contrôle, l’évaluation et la rectification des prévisions en
    fonction de leur réalisation sur le terrain ;
  • Installer les bureaux territoriaux pour l’exécution et le monitorage ; au lieu des
    agences d’exécution, privilégier l’approche territoriale effective en
    responsabilisant les ruraux eux-mêmes et en rapprochant les experts du monde
    rural ;
  • Privilégier les planifications agricoles territoriales ;
  • Créer le Fonds Souverain de Développement Local des 145 Territoires (FSDL145T) comme une agence publique qui garantira la pérennité institutionnelle en
    milieux ruraux. Ses sources de financement pourront provenir de la conversion
    du Fonds de Promotion Industrielle, de la contribution budgétaire au prorata de
    10% sur les recettes publiques, voire d’une taxe spéciale sur les exportations.
    2.3. Au sujet des embouteillages et l’assainissement de la ville de
    Kinshasa
    Il existe de solutions innovantes pour résoudre définitivement ces problèmes mais les
    intentions de différents gouvernements, aussi bonnes soient elles, ne font que répéter
    un paradigme obsolète et inefficace. En effet, il ne nous vient pas à l’esprit que la ville
    de Kinshasa spécifiquement, contrairement aux autres villes du pays, est confrontée
    à un problème environnemental global et non sectoriel, notamment une urbanisation à refaire, une mentalité à reconstruire et une pression démographique qui nécessite
    de mesures autres que celles traditionnelles.
    Cette ville est, soit à laisser à l’état et commencer dès à présent les grands travaux
    d’une nouvelle ville pour abriter un nouveau capital du pays, ou soit à transformer par
    des actions drastiques en pensant à l’érection de deux nouvelles communes (estouest) aux normes urbanistiques modernes.
    Quant à la problématique des voies urbaines, la création de secondes voies en
    superposition des anciennes artères urbaines changera la configuration architecturale
    des voies publiques, et permettra une bonne fluidité de transport et le désengorgement
    de la ville.
  1. Du point de vue Structuration du programme gouvernemental
    3.1. La monnaie nationale
    Le pouvoir d’une monnaie réside dans sa capacité à assurer les echanges
    économiques et pour ce faire, elle doit avoir cours legal dans la transaction des
    produits stratégiques qui émanent du marché national. Son usage confère son pouvoir.
    La population est confrontée à un problème de pouvoir d’achat car la monnaie ellemême n’a pas de pouvoir de transaction face à une large catégorie des produits
    nationaux, notamment nos multiples minerais du sol et du sous-sol.
    Pour renforcer la monnaie nationale, il faut imposer à la BCC d’échanger la monnaie
    locale contre une partie des minerais congolais (même 20%). Ceci aura un double
    avantage : la BCC peut se constituer des réserves en minerais (exemple or ou
    diamant) au lieu de les constituer en dollars américains ; les entreprises minières
    peuvent disposer des liquidités en monnaie locale pour effectuer toutes les dépenses
    liées à leur fonctionnement.
    3.2. L’emploi
    Créer 6,4 millions d’emplois à l’horizon 2028 est une vision minimaliste. Le secteur
    agricole seul, lorsque les paysans sont correctement pris en charge par un appui
    institutionnel structurant et professionnalisés à l’égard de l’agriculture, il est possible
    de créer plus d’emplois au-delà de la prévision actuelle qui est faite sur base d’autres
    secteurs d’activités. (p.21)
    La création et le développement des PME n’est pas impossible mais ils s’inscrivent
    dans la durée car nécessitant une culture entrepreneuriale qu’il faut construire pour y
    arriver. A ce sujet, à court et moyen termes, je propose de mettre en contribution l’INPP
    pour un programme spécial de formation professionnelle gratuite et obligatoire à tous
    les congolais en commençant par le président de la république pour donner l’exemple,
    à titre d’apprentissage de métier principal ou supplémentaire, imposable à tous
    (patriotisme et changement des mentalités obligent), avec des mesures
    d’accompagnement pour le financement à l’issue d’apprentissage. (p.25)

    3.3. L’adhésion de la RDC aux organisations régionales et sous
    régionales
    Malgré les multiples adhésions aux organisations régionales et sous régionales, le
    pays ne bénéfice pas des avantages escomptés pour son économie et sa population,
    dit clairement le programme (p.24). Mais comme solution, le programme envisage
    d’accélérer le processus d’intégration régionale et de renforcer des liens commerciaux
    avec les partenaires régionaux et internationaux. N’est-ce pas une contradiction ?
    3.4. Tourisme (p.30)
    Alors que la province de l’Equateur a un potentiel touristique immense de par son
    histoire et son ecosysteme unique au monde, le programme n’en fait aucun cas, hélas
    ! Il existe dans cette province les merveilles suivantes :
  • Jardin botanique d’EALA à Mbandaka, l’unique au monde par la diversité de
    ses essences arbustes spécifiques ;
  • CREF MABALI à Bikoro, une réserve touristique et de recherche d’espèces
    animales spécifiques ;
  • Village de BONOBO à Basankusu ;
  • Sanctuaire BAKANJA à Bokote/Bolomba ;
  • Tourbières de Penzele à Bikoro ;
  • Lac Tumba
  • Province située en pleine cuvette centrale et composée de la grande foret
    ombrophile et sempervirente caractérisée par la diversité de ses essences, la
    densité de ses peuplements et ses arbres et l’enchevêtrement de ses lianes ;
    une magie de la nature constituée des plaines avec des dénivellations douces,
    noyées sous une végétation équatorienne très dense et humide.
    3.5. Infrastructures routières (p.38)
    Sans repenser les méthodes classiques de gouvernance économique, il ne sera pas
    possible d’arriver à optimiser nos infrastructures routières ; je propose à ce sujet :
  • Se fixer des objectifs annuels sur le nombre de kilomètres à construire et à
    rehabiliter afin de faciliter le contrôle et le suivi ;
  • Revisiter la nomenclature routière en RDC. La catégorisation selon les routes
    nationales ou régionales doit changer au profit d’une autre catégorisation plus
    précise et accordant plus de responsabilités en fonction de l’usage routier.
    Citons notamment routes commerciales, routes agricoles, routes minières,
    routes touristiques, routes africaines, voirie urbaine, etc. Dans cette condition,
    les routes minières, par exemple, peuvent être financées par les entreprises
    minières.
  • Le péage est le mode de financement le plus facile à mettre en place par le
    concours d’investissements privés au lieu de surcharger les finances publiques.

    3.6. L’eau potable et l’électricité
    Des efforts peuvent être entrepris pour pouvoir améliorer la desserte en eau et en
    électricité dans nos villes mais il n’en sera pas le cas en milieux ruraux où sans la
    présence institutionnelle permanente, l’accès à l’eau potable et à l’électricité reste
    utopique. Un forage ou une installation photovoltaïque ne peut apporter de solution
    durable qu’en fonction d’une maintenance continuelle réalisée par une organisation ou
    une structure basée sur place.
    3.7. Enseignement
  • La politique de la gratuité n’est pas une panacée, elle peut être une menace à
    un bon service d’éducation. Il faut partir des catégories sociales pour constater
    que nous ne sommes pas tous des démunis face à ce besoin fondamental. Il y
    a risque d’un nivellement par le bas de toute la société, confrontée aux
    difficultés d’une gratuité qui amenuise la qualité du service. Il faut donc bien
    identifier la population cible pour ne pas accorder des avantages indus à une
    catégorie sociale à l’abri de ce besoin. L’enfant d’un paysan, d’un militaire, d’un
    fonctionnaire, est diffèrent de l’enfant d’un commerçant ou d’un employé de
    Marsavco par exemple. L’Etat ne peut pas prendre tout le monde en charge de
    la même manière pour raison de justice sociale.
  • Le programme dit construire des écoles spécialisées pour les enfants vivant
    avec handicap. Ce protocole est antinomique à la vertu de l’école inclusive qui
    voudrait que les enfants « normaux » se mélangent avec ceux vivant avec
    handicap afin d’éviter à ces derniers de développer le handicap grâce aux
    écoles spécialisées. L’école inclusive permet un contact physique qui élève le niveau de connaissance sociale à tous les apprenants. Au moyen de nouvelles
    techniques pédagogiques, l’école inclusive est expérimentée avec satisfaction
    à l’Ecole Chrétienne le Rocher située à Kinshasa dans la commune de Limete
    sur 10eme rue industrielle au numéro 22c.
  • Absence d’écoles pilotes pour expérimenter les nouvelles approches
    pédagogiques, et absence d’écoles élitistes pour former des enfants à haut
    potentiel quotient intellectuel ;
  • Les filières techniques devraient bénéficier de la gratuité à tous les niveaux
    d’apprentissage, mais hélas ;
  • Etc.
    3.8. Santé
    Je n’ai jamais compris pourquoi la lutte pour l’éradication de la malaria n’est jamais
    envisagée et pourtant cette maladie tropicale est un problème majeur de santé
    publique et peut être vaincue par la recherche biomédicale.
  1. Du point de vue modalités de mise en œuvre, coûts et
    financement du programme gouvernemental
    4.1. (p.61)
    Le programme dit que les PPP et/ou les échanges des ressources naturelles du pays
    continueraient à financer les grands projets industriels et infrastructurels. J’en appelle
    à plus de prudence car pour certaines infrastructures comme les routes, il a été montré
    ici que les finances publiques n’ont pas à souffrir car il existe de mécanisme de
    financement privé couvert par le péage.
    4.2. (p.62)
  • A la lecture du Tab.01, on peut remarquer que la répartition des coûts annuels
    est croissante. C’est une anomalie car la loi de rendement croissant et
    décroissant valable à la production micro-économique est aussi valable en
    finances publiques. Le financement devrait décroitre à partir de l’année 2027
    car au fur et à mesure de l’évolution du programme, les problèmes sont censés
    ne plus se présenter avec la même intensité ;
  • Les données du Tab.01 sont brutes et muettes, impossible de les apprécier ou
    de juger leur pertinence. Si les détails sont à trouver dans le PNSD qui est en
    cours d’élaboration, toute appréciation immédiate est nulle sans la lecture
    exhaustive de ce document ;
  • Le programme a classé le PDL-145T au niveau du pallier 6 « environnement et
    changement climatique. Ceci est inapproprié, en plus il crée une redondance
    d’interventions par rapport aux piliers 1, 4 et 5 qui reprennent les mêmes
    matières que celles du PDL-145T, au point de mettre la confusion sur quel pilier
    va être financé le PDL-145T.
    4.3. (p.63)
    Selon les perspectives macro-économiques du CPCM évoquées dans le programme,
    la situation économique restera extravertie et fragile suite à l’exposition aux chocs
    externes et internes. On peut se demander pourquoi alors un programme d’actions du
    gouvernement si ces perspectives néfastes devraient persister ?
    4.4. (p.64)
    Les recettes et les dépenses publiques mesurées par rapport au PIB vont croitre selon
    les prévisions, respectivement de 16% en 2024 à 18% en 2028 et de 21,5% en 2024
    à 22,5% en 2028. Comparées au pic atteint en 2021 par un pays comme la Tunisie
    (34,1%), il faille en conclure que la RDC sera encore loin d’une économie émergente.
    Sur ce, pourrions-nous admettre la thèse publiée récemment par FMI-Global Finance,
    un magazine américain connu pour ses classements de meilleures institutions
    financières du monde, dans lequel d’après les données macro-économiques du FMI,
    la RDC, à cause d’une gouvernance prédatrice en près de 64 ans d’indépendance en
    dépit de ses richesses minières et ses terres arables, a le triste privilège de figurer
    dans le top 5 des pays les plus pauvres du monde en occupant précisément avec
    arrogance la place de quatrième pays le plus pauvre du monde, dépassé même par de non Etats comme la Somalie et le Yémen. Il est difficile d’’identifier une cause
    unique à la pauvreté à long terme, dit le magazine ; qui ajoute des gouvernements
    corrompus peuvent transformer une nation très riche en une nation pauvre.
    Il est temps que les dirigeants congolais se posent les bonnes questions sur les causes
    de la détérioration de perspectives dans un pays aussi bien doté des ressources
    naturelles, toute autre chose restant égale par ailleurs.
    4.5. Tab.02 cadrage budgétaire (p.65)
  • Il y a une rubrique intitulée Salaires au niveau des dépenses budgétaires que
    je ne parviens à cerner d’autant plus que les dépenses dites courantes peuvent
    comptablement intégrer les charges du personnel. S’agirait-il de salaires du
    personnel politique de deux chambres du parlement et de l’exécutif ou de
    l’ensemble de rémunérations publiques ? C’est curieux de remarquer que cette
    rubrique représente un montant équivalant quasiment au montant du déficit
    budgétaire (presque 17 milliards dollars américains ou 20% du budget global) ;
  • Les déficits budgétaires consentis seront, d’après le programme, maitrisés et
    sainement financés, mais hélas, aucun mécanisme économique ou monétaire
    n’est décliné pour faire valoir cet optimisme.
    4.6. La fiscalité (p.66)
    Calqué à partir du système colonial, notre système fiscal n’a pas beaucoup changé à
    l’instar de notre système économique. Le revenu fiscal avait servi à la mise en valeur
    du pays durant l’époque colonial, mais de nos jours il n’a servi qu’à alimenter le train
    de vie des institutions. La doctrine fiscale est restée quasiment la même, mais le
    revenu fiscal réel a drastiquement baissé de nos jours à cause de l’érosion monétaire
    et de la déperdition fiscale due à plusieurs facteurs. Les impôts ne se justifient que
    dans la mesure où ils servent à la reconstruction nationale et au développement. Les
    taxes ne sont opposables aux assujettis qu’en fonction de la contrepartie pour laquelle
    elle est perçue. Cette doctrine fiscale est battue en brèches dans la gouvernance
    économique congolaise où les prélèvements ont perdu leur caractère doctrinaire pour
    se mouvoir en des méthodes de routine et draconiennes.
    A cela s’invite une situation que je qualifierai de démence fiscale par laquelle les
    prélèvements se dédoublent, se chevauchent, s’enchevêtrent pour ne produire in fine
    qu’une performance très limitée par rapport au grand potentiel fiscal que regorge le
    pays. S’ajoutent d’autres lacunes, notamment l’absence de bureaux d’études, la sous
    qualification des agents, les faiblesses de procédures et instructions, l’absence d’une
    bonne politique des ressources humaines, la faible numérisation des opérations
    fiscales, les nominations politiques des cadres de direction, etc.
    Devant un tel tableau, la solution n’est pas dans le maintien du vieux système obsolète,
    abritant les germes de contre-performance fiscale, mais ce dont il faut en toute urgence
    est le changement de paradigme fiscal par l’alignement à une doctrine fiscale simplifiée
    et orientée vers le développement du pays. Une reforme à la fois de l’appareil fiscal et
    de la doctrine fiscale faisant rupture avec le système fiscal actuel.
  • Appareil fiscal : il nous faut unifier les régies financières et les autres services
    de prélèvements en une seule superstructure qui aura l’autorité sur tous les
    revenus de l’Etat. Il faut en outre un seul compte du Trésor alimenté grâce à
    une superstructure numérique unique gérant l’ensemble des procédures et
    instructions fiscales.
  • Doctrine fiscale : il n’est pas normal d’avoir une panoplie des taxes et impôts
    pour finalement avoir un budget national modique. L’imposition est une ponction
    faite sur la consommation ou le revenu des agents économiques (ménages et
    entreprises). Il faut une pression fiscale juste et équitable, favorisant la
    consommation qui est à la base de tout développement. Un taux d’imposition
    unique sur la consommation ou le revenu est idéal pour rationaliser les
    opérations de prélèvement et optimiser les recettes publiques. Notre proposition
    ici se résume donc à un triptyque, notamment un service, une superstructure
    numérique et un taux unique sur le revenu (mais des taux ponctuels sur la
    consommation en fonction des objectifs économiques recherchés).
    Pour le secteur de la douane, les barrières non tarifaires sont un frein à la
    mobilité des marchandises et à l’optimisation des prélèvements douaniers. En
    effet, l’Etat ne peut se consteller en plusieurs entités fiscales pour exercer
    plusieurs pressions fiscales qui n’ont pas toutes la même destination (trésor
    public). L’import et l’export sont devenus, avec le désordre législatif, un secteur
    sans autorité de régulation où tout le monde s’y invite pour exercer ses
    prélèvements. Malgré l’institution du guichet unique import-export, la douane
    est réduite à un simple service de perceptions et de ventilation des recettes,
    sans un pouvoir de régulation en tant qu’autorité du secteur dotée d’un cadre
    juridique et admiratif idoines. L’assainissement du secteur import-export est
    donc urgent et nécessite l’exclusivité de l’application du tarif douanier aux
    opérations de dédouanement et exceptionnellement l’emploie au strict minimum
    d’une parafiscalité non invasive.
    4.7. La coopération (p.68)
    La mondialisation se développe d’une manière profonde et élargie sous le contexte du
    renouvellement rapide des technologies. Les opportunités et les défis coexistent. D’un
    côté la Chine et la RDC et de l’autre la Russie et la RDC, ont besoin de plus de
    rapprochement qui apportera certainement plus de potentiels de développement.
    Quelque troublant soient les circonstances mondiales aux prises avec les instruments
    de domination de l’ordre mondial américain, la Chine, la Russie et la RDC doivent
    consolider leurs partenariats stratégiques (le premier économique et le second
    militaire), élargir leurs coopérations bilatérales respectives, renforcer les échanges des
    peuples pour établir une nouvelle relation solide et stable afin de se soutenir et
    progresser ensemble.
    Malheureusement la politique du gouvernement a survolé le volet lié à la coopération
    pour n’évoquer sommairement que les coopérations multilatérales traditionnelles qui
    ne nous sont guère profitables jusqu’à ce jour.
  1. Conclusion
    C’est pour moi un motif de satisfaction d’autant plus que ce décryptage du programme
    d’actions du gouvernement Judith Suminwa a permis d’analyser minutieusement ledit
    programme en apportant ma modeste contribution sur quelques questionnements,
    quelques critiques constructives, et aussi quelques contre-propositions appréciables
    auprès de l’autorité gouvernementale.
    Me fondant sur un devoir patriotique, en tant que fils de ce pays, à travers mes moyens
    intellectuels, j’ai estimé plus que nécessaire de mettre à la disposition des décideurs
    mes réflexions sur le programme actuel d’actions du gouvernement, dans le but de
    soutenir la bonne gouvernance, d’alerter et de prévenir sur des échecs probables,
    voire d’empêcher le gaspillage des ressources publiques.
    A la premiere autorité du gouvernement, tout en félicitant le choix porté sur vos
    compétences et votre cœur maternel afin d’animer le présent gouvernement, veuillez
    trouver ici les suggestions techniques soulevées à la lecture de votre programme
    éminemment technique et j’ose croire que si elles sont prises en compte, elles vous
    aideront à appliquer des politiques plus efficaces et efficientes.

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