Le 30 juin , une indépendance à reconquérir par la rdc

Par Loucas Alouma, Écrivain et chercheur congolais

Le 30 juin 1960, une indépendance à reconquérir !

En analysant sereinement l’avenir de notre pays, une hypothèse se confirme : aussi vrai que chaque pays du monde a un rôle à jouer dans l’ordre mondial actuel, celui de la RDC semble être une réserve stratégique des ressources naturelles devant servir unilatéralement au progrès des grandes puissances mondiales. Ce rôle est pris très au sérieux par la communauté des puissances capitalistes du monde.

Notre compréhension des enjeux politiques du pays devrait tenir compte de cette hypothèse, afin de bien préparer notre pays à l’impact. Contrairement à certains responsables politiques congolais qui s’abusent à des jouissances précipitées et éphémères, notre combat pour une véritable indépendance, en plus de s’inscrire sur un processus, demande des sacrifices intellectuel et physique énormes, un effort spirituel sans précédent.
Au lieu de mener une politique de l’autruche et laisser le peuple déambulé dans l’euphorie d’un pays dit indépendant et riche, il nous faudrait préparer le peuple à s’assumer contre un avenir lui assigné sans qu’il soit celui de son rêve.

On ne me prendra peut être pas au sérieux, mais j’ai la certitude que nous sommes entrain de vivre une dernière decennie qui consacrera de manière irréversible, si rien n’est fait, ce plan macabre de confiscation de notre indépendance.

En effet, nous aurions tenté toutes les formes de pouvoir d’État sans réussir à reconquerir réellement notre indépendance.
Seul la periode de l’Etat Indépendant du Congo avait réussi cet exploit et ses résultats continuent à faire le bonheur de la Belgique et de ses associés jusqu’à nos jours.
Le pouvoir colonial aux prises avec un dirigisme étroit et un système de travail forcé s’était employé au bénéfice de la métropole et n’a pas achevé l’œuvre soit disant civilisatrice et de mise en valeur. Cette tâche sera léguée aux politiciens congolais lors de l’indépendance, mais je me demande comment auraient ils pu réussir ce rôle pour lequel ils ne disposaient ni la conception ni l’expérience, encore moins la culture ?
Le pouvoir congolais aux lendemains de l’indépendance accoucha des meurtres et assassinats. D’aucuns y ont vu la main noire des belges et n’ont pas tort au vu de la dent retrouvée de Lumumba qui crie vengeance à la place Échangeur de Kinshasa.
Le pouvoir qui succéda par un coup d’Etat militaire verra
son imperium susciter beaucoup d’espoir mais il finira dans une décadence du système ayant viré à la prédation.
Le pouvoir auto proclamé de la re-démocratisation n’a pas permis une réappropriation du destin national et sa révolution a fini par s’embourber dans sa gestation encore embryonnaire.
Le pouvoir qui s’en suivra se proclama démocratique en dépit de sa cohorte d’institutions contestées et du leadership militaire dirigeant le pays mais sans issue à la guerre imposées à l’est de la Rdc et ce, jusqu’à l’alternance dite démocratique, récente, à partir de 2019, aux prises avec l’avènement de l’opposition civile au pouvoir. Ce dernier n’a pas encore reussi à pacifier le pays pendant que le peuple affronte éperdument les exigences d’une survie douloureuse.
Tout porte à croire que si le pouvoir actuel venait à échouer, il consacrera l’impossibilité d’un retournement de la situation en faveur des intérêts du peuple congolais sur son territoire, à moins de vivre un soulèvement populaire de purification et d’autodétermination.

Quand nous avons repris le pouvoir d’administrer notre pays à partir de la vague des indépendances africaines, le pouvoir économique est resté aux mains des compagnies à charte et leurs associés. Rien de substantiel n’a été fait sur le plan du développement, sinon quelques actions publiques isolées et l’euphorie politique d’une conservation mordicus d’un pouvoir dépouillé des moyens de l’État.
Comment ne pas aborder la période coloniale car d’elle, repose toute l’histoire du pays et la compréhension des goulots qui continuent à étrangler notre progrès socioéconomique. On me dira peut être que les compagnies à charte n’existent plus, mais il faut admettre que le système d’exploitation institué par l’ère coloniale est resté constant : les capitaux étrangers restent les seuls maîtres des plus values des ressources naturelles congolaises et leurs firmes sont soutenus par des Etats puissants qui sont leurs mentors. Entre-temps, cette prospérité économique est dissociée de l’administration du pays, exactement comme au temps colonial.
Si on n’y prend point garde, le sort de notre pays est en voie d’être scellé définitivement comme étant un réservoir minéralogique et des écosystèmes au profit exclusif des puissances étrangères parmi lesquelles se mêlent nos voisins.
Pour preuve, aucune coopération bilatérale ou multilatérale avec la RDC ne va dans le sens de soutien à l’économie congolaise. Pas de routes, pas d’industries lourdes, pas de transferts technologiques, pas d’acheteurs pour nos produits agricoles, pas d’aides substantielles dans les secteurs clés comme éducation et santé, … Mais à la place, beaucoup de coopérations militaires et d’ingérences politiques. Les moyens pour nous aider à faire la guerre sont légion contrairement aux moyens pour notre développement qui eux, sont soumis aux critères et conditions insurmontables.

Je ne suis pas entrain de disculper nos dirigeants de leur responsabilité, mais cette réflexion est une alerte pour nous souvenir des goulots d’étranglement qui sont restés constants par rapport à la gouvernance de notre pays.
La tâche à accomplir pour arriver à l’émergence est très difficile et la voie est épineuse ; puissent nos esprits se consolider à la meilleure perception de la direction que nous devrons tous prendre afin de faire face aux éventualités diverses et variées qui sont guidées par des forteresses scellées depuis les temps immémoriaux, par un vieux système qui s’arroge le monopole du monde, pourtant créé par Dieu.

Au souvenir des déportations esclavagistes engendrés par le commerce triangulaire qui vidèrent l’Afrique de sa meilleure main d’oeuvre ; au souvenir également du travail forcé et de l’expropriation dont fut victime notre peuple ; au souvenir ensuite du vide institutionnel consacré par l’instabilité politique aux lendemains de notre indépendance ; au souvenir des rêves suscités par un régime autoritaire forgé par le Mobutisme ; au souvenir des malaises de la re-démocratisation qui finit dans la grande désillusion ; enfin au souvenir des tentatives de démocratisation, voire de l’alternance démocratique ; il faut dire que le sentiment actuel est celui d’une profonde inquiétude car il me semble qu’on aura tout essayé dans notre pays mais sans vraiment reconquérir notre indépendance.
Tout ceci s’inscrit sur un schéma bien tracé par un vieux système et il appartient à ceux qui président à la conduite du pays de comprendre ce à quoi il faut s’en tenir pour ne pas contribuer au schéma établi, mais de permettre à ce peuple longtemps opprimé à retrouver le sens de la vie humaine et l’importance de sa terre, à travers l’instauration d’un véritable État des droits du peuple où l’intérêt du peuple sera la nouvelle dictature.

Vive le 30/06/1960 et Bonne fête de l’indépendance !

Luc alouma / IP / AAAP
loucasalouma@yahoo.fr

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